Étiquette : caisse d’allocation familiale

fixer une pension alimentaire sans procédure judiciaire

Fixer une pension à l’amiable. L’actuel projet de réforme de la justice prévoit divers modes de déjudiciarisation et simplification des procédures, dont une expérimentation d’un nouveau mode de révision de la pension alimentaire.

les accords et les procédures amiables

Rappelons que les parents ont toujours la possibilité de fixer amiablement une pension alimentaire pour les frais d’éducation et d’entretien de leurs enfants. Les parents peuvent toujours, qu’ils vivent séparément ou non, fixer amiablement la pension qu’ils vont verser ou que l’un d’eux versera au profit d’un enfant majeur vivant hors du foyer, pendant le temps de ses études. Et à l’égard d’un enfant mineur, les parents vivant séparément peuvent toujours s’entendre entre eux sur le montant de la pension que l’un des deux va verser au parent chez qui la résidence de l’enfant est fixée. Ces pensions sont déductibles du revenu imposable, dans les limites fixées par l’administration fiscale.

La pension peut aussi être fixée par convention, signée par les deux parents.

La contribution peut aussi être fixée par acte rédigé par un avocat et signé par lui.

Un tel accord peut aussi être homologué par le juge, sans audience.

Il existe un autre cas d’accord amiable, qui a l’autorité d’une décision de justice et donc bénéficie de la force exécutoire, mais qui n’a pas besoin d’être homologué par le juge, c’est la contribution fixée par la convention de divorce par consentement mutuel, avec l’assistance de deux avocats et enregistré devant notaire. Dans ce cas, la convention de divorce qui fixe le montant de la contribution a force exécutoire, sans recours au juge.

l’accord entériné par la CAF

Les parents qui s’accordent sur le montant de la pension alimentaire pour les enfants peuvent également demander au directeur de la caisse d’allocation familiale de donner force exécutoire à leur accord, ce que celui-ci fera à condition que le montant de la contribution aux frais d’éducation et d’entretien soit au minimum du montant fixé par un barème publié par décret. Cette disposition prévue par la loi de décembre 2016 devait entrer en application le 1er avril 2018 ; la mise en œuvre de cette mesure dépend de la publication prochaine d’un barème par décret. En toute logique, ce barème sera harmonisé avec la table de référence publiée par le ministère de la justice.

l’expérimentation d’un nouveau mode de fixation amiable

C’est dans ce cadre général que prendra place la nouvelle disposition prévue par le projet de réforme de la justice, qui devrait faire l’objet d’une première phase d’expérimentation.

Le projet de réforme de la justice prévoit en effet une habilitation du Gouvernement à prendre par ordonnance, à titre expérimental, les mesures nécessaires pour permettre la délivrance des titres exécutoires afférents à la modification des contributions à l’entretien et à l’éducation des enfants, autrement que par l’obtention d’une décision juridictionnelle du juge aux affaires familiales.

Sollicité pour donner son avis sur le projet de loi, le conseil d’État a estimé que cette disposition apparaît propre à favoriser l’appréciation du dispositif envisagé au regard des objectifs qu’il recherche et qu’il est de nature à décharger les juges aux affaires familiales et à accélérer la mise à exécution des décisions de modification de ces contributions.

Cependant le Conseil d’État remarque que la rédaction initiale du projet prévoyant de confier la délivrance de ces titres exécutoires à toute autorité ou organisme soumis au contrôle de l’État était excessivement vague. Il propose, conformément aux intentions du Gouvernement, de désigner expressément les caisses d’allocations familiales. Il apporte cette précision, en ajoutant que l’ordonnance devra prévoir les garanties de compétence et d’impartialité que devront présenter les personnels affectés à cette activité. Il conserve par ailleurs la possibilité de confier la délivrance de ces titres exécutoires aux officiers publics et ministériels. Il estime que les conditions dans lesquelles est circonscrite la délivrance de ces titres exécutoires et l’application d’un barème national pour décider la modification d’une contribution préviennent le risque de solutions disparates dans des situations complexes. Le Conseil d’État relève que le recours possible devant le juge aux affaires familiales est de nature à protéger les droits et intérêts des parties.

Le projet de loi et l’avis du conseil d’état s’inscrivent donc dans une évolution générale, en œuvre dans de nombreux pays, où la pension alimentaire n’est pas toujours ni obligatoirement fixée par un juge, mais selon divers modalités amiables ou administratives, à charge de recours devant un juge en cas de nécessité. En France, compte tenu du rôle prééminent des caisses d’allocations familiales, renforcé encore par la création d’une agence de recouvrement des pensions alimentaire, les caisses d’allocations familiales paraissent effectivement les mieux placées pour rendre ce service aux parents, lorsqu’il n’y a pas de conflit. Ce serait une mauvaise idée de multiplier encore les intervenants.

Et en cas de contentieux, la médiation familiale devrait être privilégiée ou la procédure collaborative par avocats, tout en préservant le droit de tout parent de saisir le juge aux affaires familiales, en cas de nécessité et/ou de litige.

avis du conseil d’état sur le projet de réforme de la justice

Comment fixer la contribution lorsque les revenus ne sont pas connus ?

table 2015Une étude de l’OCDE indique que 17 % des revenus ne sont pas déclarés en Europe. La France se situe dans la moyenne.

Que faire lorsque l’un des parents ne déclare pas ses revenus ? Ou fait une déclaration erronée ou minorée ? Que faire en cas de revenus variables ou intermittents ? Comment calculer le montant de la contribution lorsque les revenus ne sont pas connus ?

REVENUS CONNUS

Lorsque les revenus sont connus, la fixation de la pension alimentaire versée pour l’éducation des enfants est simplifiée par l’existence de la table de référence, diffusée par la circulaire du 12 avril 2010. L’avis d’impôt ou déclaration des revenus établie par l’administration fiscale constitue généralement la base la plus fiable et la plus complète pour déterminer les revenus à prendre en compte pour calculer le montant de la contribution d’un parent aux frais d’éducation et d’entretien de l’enfant. A défaut, le cumul net imposable tel qu’il apparait sur le bulletin de paie du dernier mois de l’année, constitue également une base de référence valable, s’il n’existe pas d’autres revenus d’activité, fonciers ou mobiliers.

REVENUS VARIABLES

Il est fréquent que les revenus varient d’un mois à l’autre, soit qu’ils dépendent d’une activité artisanale ou libérale ou en auto entreprise soit qu’ils proviennent de missions en intérim espacées de périodes d’inactivité ou d’une succession de contrats à durée déterminée et de périodes de chômage indemnisé ou non ou encore parce que le salaire fixe est complété de primes ou revenus exceptionnels. Dans tous ces cas, la meilleure solution consiste calculer la moyenne mensuelle des revenus en divisant par douz le cumul de toutes les ressources de l’année.

Si les revenus varient fortement d’une année sur l’autre, la moyenne peut être faite sur les deux ou trois dernières années.

ABSENCE DE REVENUS

De par la loi, chaque parent est obligé de contribuer aux frais d’éducation et d’entretien de ses enfants, en proportion de ses ressources et des besoins de l’enfant. Peut être affranchi de cette obligation, celui qui prouve être dans l’impossibilité matérielle de contribuer aux frais d’éducation et d’entretien des enfants, c’est-à-dire le parent qui ne dispose d’aucun revenu. La contribution pourra dans ce cas être suspendue jusqu’à retour à meilleure fortune.

L’importance réelle ou alléguée des charges fixes (crédits) ou variables n’est pas un motif pour s’affranchir de toutes obligations envers ses enfants : en effet, la contribution aux frais d’éducation et d’entretien de l’enfant constitue une obligation alimentaire ; en tant que telle, elle est prioritaire sur toute autre dépense.

Le juge ne doit pas fixer une obligation que le débiteur serait dans l’impossibilité pratique d’honorer ou qui serait disproportionnée par rapport à sa capacité de paiement, car les moyens d’exécution de la décision, qui sont à la disposition du créancier d’aliment (ou de la Caisse d’allocation familiale qui s’y substitue) peuvent avoir des conséquences graves (saisie sur les salaires, revenus, comptes ; blocage des comptes etc.).

Si un parent est temporairement privé de ressources et qu’il est dans l’impossibilité matérielle d’honorer son obligation alimentaire, il peut être dispensé du paiement de toute contribution, jusqu’à retour à meilleure fortune.

REVENUS INCONNUS

Lorsque les revenus du parent ne sont pas connus,  le montant de la pension peut être fixée selon la capacité de ressources du parent concerné. Dans ce cas les revenus réels peuvent être estimé en fonction des éléments du train de vie (valeur des véhicules possédés ; montant des loyers ou valeur des biens immobiliers ; séjours à l’étranger, loisirs et vacances).  La qualification, l’expérience professionnelle peuvent être pris en compte.

Un parent ne peut être exonéré de ses obligations du seul fait qu’il ne communique pas ses ressources ou n’en justifie que partiellement.

Le juge doit veiller à l’intérêt supérieur de l’enfant, qui est de disposer de conditions de vie et d’éducation satisfaisantes, grâce au soutien matériel et financier de ses parents.

REVENUS OCCULTES

La déclaration fiscale vaut présomption de revenus, c’est-à-dire jusqu’à preuve du contraire.

En cas de revenus volontairement minorés ou partiellement occultés, une analyse comptable ou expertise patrimoniale peut être ordonnée.

Si le parent qui a la charge de l’enfant affirme que l’autre parent cache une partie de ses revenus, le juge peut prendre en compte le train de vie (véhicules, maison, piscine, voyages, montant des crédits et loyers, montant des dépenses) ou à la capacité de se procurer des revenus (activité exercée, diplômes, formation, expérience professionnelle).

Les revenus déclarés à l’administration fiscale seront donc retenus, sauf s’il ressort du dossier des éléments de train de vie qui attestent manifestement d’un niveau de vie supérieur aux seules ressources déclarées.